Association

« Les Amis de Notre-Dame des Anges »

Histoire


 NOTRE-DAME-DES-ANGES à CHALAIN LE COMTAL

            Le village de Chalain-le-Comtal, dans la plaine du Forez, est à 9 km de Montbrison. On voit de loin la flèche élancée de son église dont on a fêté le centenaire de l’édification en 1995.

           Environ à 400 m à l’est du village dans le cimetière actuel qui avait été désaffecté officiellement en 1743 puis remis en usage en 1883, on voit toujours au sommet et à l’aplomb des balmes inclinant vers la plaine basse de la Loire : la chapelle de Notre-Dame des Anges.

LA CHAPELLE DE NOTRE-DAME DES-ANGES

          L’arcade dont le pignon est découronné porte sur deux piliers à imposte sobrement mouluré que butent des contreforts en éperon. La toiture repose sur une corniche formée d’un filet et d’une doucine (terme architectural).

Cette construction en matériaux calcaire bien appareillée paraît dater des premières années du XIIIe siècle.

          Lorsqu’en 1743, on cessa d’enterrer dans le cimetière, la chapelle de Notre-Dame servie toujours au culte. On y venait en pélerinage et on y célèbrait la messe tous les vendredis et parfois les mercredis jusqu’au moment de la révolution (1789).

          Elle comprenait la coquille (choeur actuel) telle qu’elle existe. Au moment de sa restauration, on découvrit sous une couche de badigeon des débris de peinture, exact comme coloris à celle existant en 1790 dans le choeur de l’ancienne église de Grézieux-le-Fromental, abandonnée et détruite en 1888 (voir les bulletins de la société de la Diana).

                                     Le choeur de la chapelle, avant sa rénovation.

          La chapelle du cimetière de Chalain, avait, en plus une annexe aussi grande que celle existante actuellement. Laquelle, bâtie en cailloux roulés de la Loire, beaucoup moins soignée que le choeur qui est de pierre taillée, qui sont en partie des pierres à chaux. La chapelle de Chalain avait environ 6 m de longueur sur 5 m de largeur, au moment de sa restauration, souvenirs locaux.

          La chapelle du cimetière a subit au cours des siècles trois incendies, mais jamais la coquille ne fut touchée. Elle a été reconstruite dans son ancien style par Monsieur ETIENNE, architecte de Saint-Etienne qui avait agrandit « La Pommière ».

    UN SANCTUAIRE MODESTE MAIS ANCIEN

        Des archéologues ont mis à jour, le pré jouxtant le cimetière, des squelettes d’origine très ancienne dont la tête était tournée vers l’Est. Une bataille aurait eu lieu pendant les guerres de religion (1572 à 1590) autour du cimetière et d’après les recherches de Messieurs OLLIER curé, PEURIERE archiprêtre, Thomas ROCHIGNEUX secrétaire de la société de la Diana, on aurait trouvé sur place des armes et un casque ainsi que des ossements. ces morts avaient été inhumés le visage tourné vers l’Orient.

         En 1793, Monsieur PEYRON, garde de Monsieur De CURRAIZE, grand-père du secrétaire de mairie (le texte date de 1895) avait dit à son petit-fils que la famille SARDIN aurait volé la cloche de la chapelle. Ils étaient propriétaires du moulin de Boisset sur le bief de la Mare. La cloche leur servait pour appeler les ouvriers. Ce vol ne leur a pas porté bonheur. Ils ont tous eu une fin malheureuse.

LA STATUE DE NOTRE-DAME-des-ANGES

          La statue de bois sculptée de la Vierge à l’Enfant de la chapelle du cimetière de Chalain date probablement de 1380, règne de Charles VI.

          Elle est polychrome, sa robe rouge, ajustée au corsage, s’évase à partir des hanches dans une belle harmonie, les plis sont légèrement cassés sur les pieds chaussés de noir. Le décolleté carré est spécifique de l’époque. Le manteau de cour (car c’est de la Reine du ciel qu’il s’agit) est doublé de vair, il remonte derrière le cou, la chevelure ondulée retombe sur les épaules, la couronne d’orfèvrerie sculptée à même le personnage est déteriorée sur le côté. On peut admirer le port de la tête et l’expression de noblesse qu’a su donner l’artiste au personnage qu’il a créé. Les paupières sont abaissées dans une douce humilité vers l’enfant. Les mains sont fortes et grandes comme dans les Vierges de majesté. Elles sont faites pour soutenir et montrer le chemin vers Celui qu’Elle donne au monde. L’enfant Jésus est nu, il tient une grappe de raisin, son visage est peut-être ce qu’il y a de moins réussi dans ce groupe.

          C’est peut-être là l’oeuvre d’un apprenti. Mais cette Vierge vénérable a disparu de l’humble chapelle, au grand regret des Chalainois. Une autre statue portant les mêmes vêtements a été créée par un ébéniste contemporain et placée dans l’église du village. C’est toujours l’image de Notre-Dame des Anges malgré une immense différence. Si je fais une réminiscence de la description statuaire c’est qu’il est précieux de se souvenir de la merveille que possédait Chalain-le-Comtal durant des siècles.

          En 1773, la chapelle fut brûlée, néanmoins les murs restèrent blancs, ne paraissant pas avoir subi l’action du feu. La statue fut emportée à l’église. Plusieurs fois, il fallut aller la chercher au milieu des murs calcinés de sa chapelle. C’était là, un signe préventif du désir de la Sainte Mère de Dieu de vouloir être dans cet endroit.

           Le garde-chasse de Monsieur de CURRAIZE : Monsieur PEYRON, prit un jour la décision importante de cacher dans sa cave cette statue voyageuse afin de la mettre à l’abri des profanations jusqu’à des jours meilleurs. Les gens de Chalain-le-Comtal ignoraient tout de ce qu’était devenue la madone. En 1888, le petit-fils de Monsieur PEYRON raconta à Monsieur FORISSIER l’aventure incroyable de cette statue antique.

   LA TRADITION POPULAIRE et LA CHAPELLE DE NOTRE-DAME-des-ANGES

          Lorsque vinrent de mauvais jours, avec une baisse profonde de la pratique religieuse chrétienne, les attaches séculaires ne furent pas détruites. La foi des âmes simples continua à voir se manifester les volontés de Dieu sur ce sol auquel ils étaient attachés. Voici deux faits conservés dans les mémoires:

       « Un bouvier gardant ses troupeaux dans la prairie de Chalain, alla un jour chercher la statue miraculeuse de Notre-Dame dans la chapelle. Il la plaça dans la prairie pendant qu’il assisterait à la messe. Les animaux ne bougèrent pas et la statue revint seule à sa place, sur l’autel. L’évènement fit grand bruit dans le Forez…

         Deux autres bouviers voulurent tenter l’essai. Ils prirent la statue et la laissèrent pour veiller sur leur troupeau. Mais au lieu d’aller à la messe, ils allèrent voler des pommes dans le verger du château de « La Pommière », situé à cette époque à la place du pasquier. La statue, comme la première fois, fut retrouvée dans la chapelle, mais les boeufs et les vaches s’étaient sauvés. Furieux, les bouviers se permirent de frapper la statue. Il jaillit du sang dont il resta longtemps des traces sur les murs de la chapelle. Au dire de chacun, ce sacrilège ne resta pas impuni. Les bouviers séchèrent (expression locale) et moururent de langueur, cherchant à se détruire. »  

        Vendue comme bien national pendant la Révolution, la chapelle et le cimetière abandonnés devirent la propriété de la famille MAZARD. En peu de temps, toute la famille mourut par punition, pour avoir acquis un bien sacré (tradition orale).

        Le père DURRIS en fit un hangar à fourrage et dut faire bâtir des murs pour la consolider. Ces murs furent démolis au moment de la réédification de la chapelle en 1888. La belle-fille de DURRIS partagea les biens familiaux ; ses enfants vendirent l’emplacement de l’ancien cimetière au Conseil Municipal en 1883. C’est à cette époque que le cimetière du bourg fut abandonné. En 1885 le cimetière actuel fut cloturé et on put alors commencer d’inhumer.

RESTAURATION DE LA CHAPELLE

        En dépit du temps et après délibérations, la somme de 4.023 francs, votée en 1870 pour frais de guerre, fut conservée dans un budget communal et attribué en 1888 à la restauration de la chapelle Notre-Dame.

        Le devis immédiatement voté et arrêté, fait par ETIENNE, architecte Stéphanois fut approuvé et l’adjudication fut donné aux frères CHAPELLE, maçons à Saint-Galmier, transporté au Bréat et la pierre sacrée servit de bonde à l’étang Bardoire. La tradition disait que toutes les années où l’étang Bardoire était en eau, Chalain subissait des orages de grêle. Pendant 7 ans, la réalité de ce dicton fut exacte de 1883 à 1890.

       Lorsque Monsieur FORISSIER acquit le domaine du Bréat EN 1890, il fit ramener la pierre d’autel à sa première destination le 14 août 1890. Depuis il ne grêle plus à Chalain. Monsieur le Curé OLLIER fit placer la pierre sacrée comme seuil devant la porte de la Chapelle, elle occupe exactement cet emplacement.

       La chapelle restait à meubler ; grâce à la générosité du Conseil de Fabrique et à une quête auprès des habitants, des bancs furent commandés à Peycelon, menuisier à Boisset-Les-Montrond. Les vitraux sont de MAUVERNAY, le vitrailliste de Saint-Galmier. Le vitrail du milieu de la façade représentant « la Sainte Vierge à Lourdes » est un don de Monsieur le Curé OLLIER.

       La décoration de la chapelle offerte par Monsieur FORISSIER et Madame Valérie BALAY a été faite par MAUVERNAY, plâtrier peintre. Les dessins fournis par ETIENNE, l’architecte Stéphanois. La voûte, peinte en bleue est parsemée d’étoiles d’or.

       Une inscription peinte au-dessus de la porte d’entrée, à l’intérieur, rappelait cette restauration et portait les noms de quelques habitants de Chalain, dont Henry FORISSIER, maire de village à cette date. L’humidité avait abimé cette inscription, de nouveaux travaux eurent lieu en 1950.

A gauche, l'ancienne porte en bois. 

A droite, la nouvelle porte réalisée par les Compagnons du Devoir.

Pour entrer dans la Chapelle on descend deux degrés en pierre. La nef porte sur le sol une large croix de forme latine gris foncé. Cette nef est éclairée par deux baies ogivales ornées de motifs géométriques de couleur.

      L’escalier qui permet d’accéder au choeur est recouvert de marbre blanc. La table de communion est celle de l’église de Chalain supprimée lors du dernier Concile. Sur le tabernacle était posée la statue polychrome en bois sculpté. La madone volée a été remplacée par une oeuvre d’un sculpteur Stéphanois. Elle est dans l’église de Chalain-le-Comtal.

       L’ensemble du mobilier actuel est assez vétuste, les peintures murales étaient très abîmées par les gouttières et les intempéries. La voûte du Choeur était très endommagée, on voyait cependant les étoiles à six pointes qui la décoraient. Les murs du Choeur sont enduits de plâtre dont les couleurs brun rose représentent des draperies. La nef porte des peintures murales bleues recouvertes d’un chaulage blanc.

       Le jour de la bénédiction de la chapelle, le deuxième dimanche après Pâques 1890, la statue fut portée solennellement par Messieurs PEYRON et OLIVIER, ancien maire, suivie du Conseil Municipal, dans la Chapelle. Après la bénédiction, elle fut placée sur son socle par CHAFFENGEON adjoint, PEYRON et OLIVIER.

      Les documents anciens parlent de source ou fontine où les pélerins trempaient le linge de leurs enfants malades. Est-ce la source qui coule toujours au bord du pré dans le petit chemin ? Je n’ai rien trouvé à ce sujet.

      La dévotion des Chalainois envers Notre-Dame-des-Anges est citée en 1327 dans un acte passé entre le Prieur de Savigneux et le doyen du chapitre (les couvents de Montbrison de Broutin).

Dans l’histoire du Païs de Forez du chanoine Jean-Marie DE LA MURE éditée en 1674, la Chapelle de Chalain est évoquée. Preuve de la notoriété qu’elle avait dans le Comté du Forez.

Puissent ces quelques lignes faire partager à ceux qui les lieront notre amour pour notre Histoire et la conservation du patrimoine légués depuis des siècles par la Foi de nos aïeux. Si quelques légendes naïves vous paraissent peu crédibles, pensez que la simplicité des petits est aussi valable que le savoir des grands.

Marie GRANGE